En juillet 2022, un rapport publié par Gartner (article en anglais) désignait la rétention et l’attraction des talents comme un défi à appréhender à l’avenir par les recruteurs. Capterra a réalisé une enquête auprès de 1 007 employés français afin de déterminer les paramètres susceptibles d’aider les entreprises dans leur stratégie.
Dans cet article
- Les employés français interrogés sont les moins satisfaits quant à leur emploi actuel
- Quels facteurs influent sur la satisfaction des salariés en 2023 ?
- L’enjeu du rôle managérial pour la rétention des talents
- Vers un développement du job hopping ?
- Le parrainage, un processus bénéfique pourtant boudé par 45 % des entreprises des employés interrogés
- Les points clés d’une stratégie de rétention des employés
“L’engagement des collaborateurs est un enjeu clé pour toutes les entreprises [...]. Elles doivent comprendre les attentes explicites et implicites de leurs candidats et employés.” Tel est le constat posé par Jean-Noël Chaintreuil, stratégiste pour le laboratoire de conseils Change Factory, interrogé lors d’un entretien réalisé par Capterra en janvier 2023 sur les challenges entourant la rétention des employés.
Alors que certains secteurs ont enregistré des taux record de difficulté de recrutement en 2022, et que des aspirations à de nouveaux modes de travail mais aussi de management bousculent le monde de l’entreprise, identifier les facteurs propices à attirer et à engager les talents de demain est une problématique plus que jamais d’actualité pour les responsables des ressources humaines (RH) et les managers.
Mais les entreprises prennent-elles pour autant la mesure des attentes de leurs employés ? Quelles raisons en 2023 peuvent conduire à un désengagement des salariés ? Quels facteurs sont à l’inverse source de satisfaction et de fidélisation des talents ? Le “job hopping” se présente-t-il comme une tendance progressant dans les habitudes des employés ? Le potentiel “d’ambassadeur” des employés auprès de nouveaux talents est-il suffisamment exploité par les organisations ?
C’est ce qu’a souhaité savoir Capterra en interrogeant près de 6 091 employés à travers divers pays (Allemagne, Australie, Canada, France, Mexique et Royaume-Uni) dans une étude menée en juillet 2023. Le panel français, sur lequel s’est principalement concentré cet article, est composé de 1 007 participants.
Une méthodologie complète est disponible à la fin de cet article.
Les employés français interrogés sont les moins satisfaits quant à leur emploi actuel
Face à des perspectives économiques moins encourageantes qu’en 2022 dressées par la Banque Mondiale et à un contexte d’inflation affectant toujours le pouvoir d’achat, maintenir son emploi apparaît comme primordial pour de nombreux salariés.
Pour 52 % de l’ensemble des salariés français interrogés, quitter son entreprise actuelle n’est certes pas à l’ordre du jour. Il n’en demeure pas moins que 37 % considèrent cette éventualité, quand 11 % se déclarent incertains sur le sujet.
Mais s’ils sont enclins à rester à leur poste actuel, leur degré de satisfaction va-t-il de pair avec cette tendance observée ? Pour 52 % des employés français sondés lors de notre enquête, la satisfaction semble être au rendez-vous (40 % “satisfaits”, 12 % “très satisfaits”). Ils sont en revanche 25 % à exprimer l’inverse (18 % “insatisfaits”, 7 % “ très insatisfaits”), et 23 % à afficher une opinion neutre.
Si ces résultats s’avèrent encourageants, c’est à l’aune des comparaisons avec les participants des autres pays européens interrogés qu’un écart significatif peut être observé.
La France enregistre ainsi les taux les plus faibles de satisfaction, mais aussi les plus forts en matière d’insatisfaction, par rapport aux participants d’autres pays européens sondés :
- 62 % des participants provenant du Royaume-Uni et d’Allemagne se disent satisfaits à très satisfaits,
- seulement 14 % des employés britanniques et 15 % des employés allemands indiquent être “insatisfaits” à “ très insatisfaits”.
Quels facteurs influent sur la satisfaction des salariés en 2023 ?
Des incertitudes liées au contexte économique récent aux craintes soulevées par la mutation des compétences professionnelles face aux évolutions technologiques, en passant par les ajustements structurels exigés lors de la crise sanitaire, des facteurs additionnels ont pu s’ajouter à ceux déjà susceptibles d’altérer le bien-être et la satisfaction des employés.
Pour comprendre quels paramètres généraux sont liés à la satisfaction des employés, nous avons demandé à l’ensemble de notre panel d’identifier quels éléments ont pu avoir une influence négative ou positive sur leur expérience, en prenant en considération la globalité de leur parcours professionnel.
Le stress au travail, une menace qui pèse toujours sur l’équilibre des salariés
Selon un sondage publié par OpinionWay en mars 2023, la santé mentale des employés s’est encore fragilisée par rapport à 2022. Outre des causes extérieures à la vie professionnelle des salariés, il existe différentes sources pouvant affecter le bien-être de ces derniers et accentuer leur insatisfaction au travail. Relevé par 33 % de l’ensemble des répondants de notre enquête, un haut niveau de stress est l’un des facteurs principaux ayant généré de l’insatisfaction.
Si cet élément est parmi les principaux pouvant affecter leur engagement, les questions liées à un salaire jugé insuffisant (33 %), des primes non adaptées (29 %) et le manque de reconnaissance quant aux efforts fournis (26 %) font également partie des paramètres mis en cause.
L’équilibre entre vie privée et vie professionnelle, un moteur essentiel de la satisfaction au travail
Pour 40 % des salariés interrogés, l’équilibre entre vie privée et vie professionnelle est jugé comme le principal moteur de satisfaction qu’ils ont pu observer tout au long de leur expérience professionnelle.
Un autre facteur, lié à leur environnement de travail, est également mis en avant par ces répondants : celui d’entretenir des relations harmonieuses avec leurs collaborateurs (39 %). Ce critère devance même celui d’un salaire répondant à leurs attentes (37 %). Enfin, pour 34 % de l’ensemble de notre panel, la notion de sens et d’utilité dans leur parcours professionnel est également considérée comme vecteur important de satisfaction.
Conseils aux entreprises : quelques bonnes pratiques peuvent vous aider à améliorer le bien-être et la satisfaction de vos collaborateurs :
- invitez vos employés à faire usage tout au long de l’année de leurs congés disponibles et veillez à ce que ces derniers n’excèdent pas leurs horaires de travail pour faciliter leur déconnexion à l’aide d’outils de suivi dédiés ;
- encouragez des activités visant à améliorer la cohésion entre vos collaborateurs, que ce soit au travers d’événements en présentiel ou à distance ;
- aidez-les à appréhender le sens et l’utilité de leur mission en leur montrant comment leur performance contribue à atteindre les objectifs de votre organisation ;
- reconnaissez leurs mérites et accomplissements en leur fournissant des feedbacks par le biais de solutions telles que des logiciels d’engagement.
L’enjeu du rôle managérial pour la rétention des talents
Nous avons interrogé l'ensemble des répondants sur les compétences et qualités dont un manager doit selon eux disposer pour les soutenir dans leur travail, en prenant en compte l’ensemble de leur expérience professionnelle. Les réponses des participants mettent ainsi en avant :
- l’aptitude à reconnaître les efforts et le travail fourni (51 %) ;
- la capacité à maintenir un environnement de travail positif et collaboratif au sein de l'équipe (40 %) ;
- La compétence de soutien, en fournissant les outils ou les ressources nécessaires pour faciliter l’exécution des tâches (31 %) ;
- la faculté de gestion et de reconfiguration de la charge de travail des employés (31 %).
Amenés à développer des qualités d’intelligence émotionnelle dans la gestion du bien-être des collaborateurs, à adapter leurs pratiques à la lueur des nouvelles technologies et de l’évolution des modes de travail, les managers ont désormais une fonction pluridimensionnelle. Leur rôle est plus que jamais essentiel quant à l'expérience positive et l’engagement des employés.
Conseils aux entreprises : il existe plusieurs façons pour un manager de reconnaître et valoriser les compétences des collaborateurs. L’une d’entre elles est de pouvoir démontrer la confiance qu’il place en ses équipiers en favorisant leur autonomie, en leur proposant par exemple plus de flexibilité dans l’organisation des tâches qu’ils effectuent au quotidien et en veillant à des processus de travail et de collaboration harmonieux.
Pour ce faire, un manager peut s’appuyer sur différentes solutions : des logiciels de tâches pour faciliter l’organisation et la distribution de la charge de travail, des logiciels de planning afin de gérerau mieux la rotation du personnel, ou encore des logiciels de gestion des ressources pour identifier quels besoins sont à anticiper dans le cadre d’un projet.
Vers un développement du job hopping ?
Outre les aléas économiques pouvant amener des entreprises à réduire leurs équipes ou le développement de types de contrats à durée déterminée, d’autres facteurs ont pu amener les employés à remettre en question l’idée d’un emploi conservé sur le long terme.
Le job hopping, pratique consistant à occuper plusieurs emplois dans un laps de temps relativement court, est une illustration de cette tendance. Ce phénomène est-il toutefois répandu parmi les employés interrogés ?
Force est de constater que seuls 7 % ont changé d’emploi de 3 à 5 fois au cours des cinq dernières années, et 2 % plus de 5 fois.
Pour ces groupes de répondants, que l’on peut qualifier de job hoppers, l’obtention d’un meilleur salaire est l’une des raisons principales les incitant à multiplier les expériences (37 %). Il est à noter que des raisons liées directement à l’environnement de travail et à la culture d’entreprise sont également mentionnées, soit le souhait de changer d’environnement de travail (32 %), la recherche d’une plus grande flexibilité (28 %), ou encore la volonté d’exercer dans une structure plus alignée avec ses valeurs (26 %).
Conseils aux entreprises : pour une entreprise, la question du job hopping pose souvent la problématique de la loyauté et de la rétention d’un talent. Toutefois, de par leurs expériences diverses, ces candidats peuvent apporter des compétences et une expérience bénéfiques pour toute organisation. Pour 33 % des employés de notre panel considérés comme des “job hoppers", il s’avère que leur changement d’emploi fréquent a même été valorisé par leur recruteur.
En clarifiant dès le départ quelles sont les attentes du candidat et celles de votre entreprise lors du processus de recrutement, et en mettant en avant les valeurs et avantages que peut offrir votre structure, il est possible pour les recruteurs d’identifier les possibilités dont votre entreprise dispose pour retenir ce type de profil.
Le parrainage, un processus bénéfique pourtant boudé par 45 % des entreprises des employés interrogés
Bien qu’il existe de nombreuses façons de trouver la bonne personne pour un poste à pourvoir, telles que la diffusion sur les sites d'emploi ou via des réseaux sociaux, un autre moyen peut compléter les actions de recrutement d’une entreprise : les programmes de parrainage. Ce processus peut permettre de tirer parti du réseau professionnel de vos talents en poste, leur donner la possibilité d’agir en tant qu’ambassadeur de votre entreprise et d’être reconnus pour leurs efforts.
Un avantage cependant peu exploité par les entreprises de notre panel de participants, puisque 45 % déclarent n’avoir aucun programme de ce type à leur disposition. Si près de 14 % affirment ne pas savoir si un tel processus existe au sein de leur structure, 15 % indiquent pouvoir contacter leur service RH sans qu’aucun programme ne soit établi, démontrant ainsi que la recommandation de candidats fait donc pourtant partie de leurs pratiques. Toutefois, cette forme de parrainage informelle ne garantit pas une implication sur le long terme des employés puisqu’elle ne propose pas de reconnaissance ou d’avantages en nature pour les récompenser de leurs efforts.
À l’inverse, seuls 26 % disent bénéficier d’un programme de parrainage sous la forme d’une plateforme dédiée (16 % ) ou de moyens de communication traditionnels (10 %).
Une opportunité pour renforcer la qualité des recrutements et la collaboration
Parmi les employés de notre panel bénéficiant d’un tel programme, 53 % affirment avoir déjà recommandé un candidat par ce biais. Proposer un candidat dont les compétences peuvent être bénéfiques pour leur entreprise (41 %) et avec lequel ils peuvent aisément collaborer (27 %), ainsi que la perspective de recevoir une récompense sous la forme de bonus (18 %) font partie des motivations invoquées.
Lorsqu’un employé recommande un candidat, c’est bien souvent parce qu’il considère que ce dernier dispose des compétences requises. De plus, s’ils ont préalablement travaillé ensemble, cela signifie que leur collaboration a pu être positive. L’intégration de ce type de candidat au sein d’une équipe peut de ce fait être facilitée.
Absence de reconnaissance, communication opaque et manque d’engagement dans le processus freinent l’usage de ces programmes
13 % des employés disposant d’un programme de parrainage n’ont toutefois jamais pris part à ce processus et se déclarent non intéressés.
Pour ces derniers, le fait de ne bénéficier d’aucune reconnaissance sous le forme de bonus ou de félicitations (29 %), le manque de visibilité sur les postes ouverts (24 %), ou encore le fait de juger que ce type d’activités n’est pas de leur responsabilité (21 %) sont présentés comme des freins principaux.
Conseils aux entreprises : outre l’implémentation d’un logiciel de parrainage permettant de faciliter et d’automatiser la gestion des candidatures proposées, certaines bonnes pratiques peuvent favoriser le succès et l’adoption d’un programme de parrainage, telles que :
- veiller à sa visibilité auprès de ses employés, en présentant ses bénéfices dès la phase d’onboarding des employés et en communiquant autour de ses résultats lors des réunions d’entreprise ;
- valoriser la participation des employés sous la forme d’une récompense adaptée aux capacités de sa structure, que ce soit par des primes financières, des bons de réductions, des heures de congés exceptionnelles, ou encore un événement spécifique d’entreprise informel ;
- soutenir ses employés dans leur rôle d’ambassadeur, en les aidant par exemple à optimiser leurs publications d’entreprise sur leurs réseaux sociaux professionnels à l’aide de formations spécifiques et d'outils dédiés ;
- assurer la visibilité des postes disponibles à l’aide, par exemple, d’une newsletter hebdomadaire envoyée aux employés ou d’informations accessibles via l’intranet de l’entreprise.
Les points clés d’une stratégie de rétention des employés
L’engagement et la rétention des collaborateurs demande un effort nécessaire, tout au long de leur parcours d’employés. Il convient dès le recrutement de communiquer de façon claire et transparente sur la proposition et les expectatives de l’entreprise, et ce, pour nouer dès le départ un pacte de confiance entre employeurs et employés. Des premiers échanges lors des entretiens à la contraction finale, tout salarié doit pouvoir comprendre ce qui est attendu de lui et ce qu’il peut espérer en retour avant même d’effectuer ses premiers pas dans l’entreprise.
Si le rôle des responsables RH est important dans ce processus, celui du corps managérial l’est tout autant. En identifiant quels sont les facteurs externes et internes affectant les performances et la satisfaction professionnelle générale, les ressources dont leurs équipes peuvent avoir besoin, mais aussi en étant force de motivation par la reconnaissance des efforts fournis, les managers contribuent pleinement au succès des employés.
Méthodologie
Pour collecter les données de ce rapport, Capterra a mené une enquête en ligne en juillet 2023 auprès de 6 091 employés allemands, australiens, britanniques, canadiens, français et mexicains. Le panel français était composé de 1 007 répondants et ceux-ci ont été sélectionnés selon les critères suivants :
- Réside en France
- Âgé(e) de 18 ans à 65 ans
- Employé(e) à temps plein ou à temps partiel
- Travaille au sein d’une PME de 2 à 250 employés
- Reporte auprès d’un responsable direct
- N’occupe pas de poste de propriétaire ou de stagiaire