Faire appel aux services en ligne d’un freelance pour une mission particulière, réserver un hébergement auprès de particuliers ou partager un véhicule le temps d’un trajet via une plateforme dédiée, toutes ces activités ont pour point commun un même principe : celui de l’économie collaborative. Comment ce concept se traduit-il en pratique dans le quotidien des Français ?

Dans cet article
- Quelle est la définition de l’économie collaborative ?
- L’économie collaborative fait-elle réellement écho auprès des Français ?
- Le facteur économique, motivation principale des adeptes de l’économie collaborative
- L’hébergement, l’activité reine de l’économie collaborative
- Des utilisateurs à l’épreuve de la désintermédiation
- Un manque de connaissances freine l’adoption de l’économie collaborative
- Le défi majeur de la régulation gouvernementale
- L’économie collaborative façonne le paysage économique de demain
Connue également sous le nom d’économie de partage, l’économie collaborative met l’accent sur la dimension sociale des échanges économiques, en favorisant l’acquisition, le partage et l’accès à des biens et services entre pairs, tout en veillant à minimiser les intermédiaires.
Porté par la digitalisation des pratiques et le développement de diverses plateformes numériques dédiées, ce modèle économique peut à présent couvrir un large éventail de ressources partageables et opérer au-delà des limites de son cercle proche.
Si le concept présente certains bénéfices, telle que la perspective pour le consommateur de modérer ses dépenses, mais aussi de réduire son impact environnemental en partageant des ressources, il suscite toutefois différents questionnements quant à ses dérives potentielles comme cela a pu être observé dans certains secteurs.
Quels sont les avantages et inconvénients de l’économie collaborative perçus par les Français ? Quel est leur degré d’implication en la matière ? Voici le sujet abordé par Capterra dans une enquête menée auprès de 1 003 consommateurs français en octobre 2022.
Une méthodologie complète est disponible à la fin de cet article.
Quelle est la définition de l’économie collaborative ?
Rompre avec le principe d’intermédiation traditionnel des échanges commerciaux et mutualiser des ressources existantes peu utilisées : telle est la philosophie initiale qui sous-tend le concept d’économie collaborative.
Là où le modèle économique ordinaire opère une délimitation claire entre les entreprises et les clients, l’économie collaborative estompe la distinction entre consommateurs et fournisseurs en se basant sur un échange dit de pair à pair (P2P). Ce principe permet ainsi à tout individu ou entité professionnelle, d’acquérir, de partager ou de fournir un accès à des ressources déjà existantes et peu ou pas exploitées. Cela peut concerner par exemple le partage d’un véhicule particulier pour effectuer un trajet, ou encore une chambre d’ami vacante proposée comme chambre d’hôte.

Si le principe d’économie collaborative existait avant l’ère numérique, l’accès à Internet et le développement des nouvelles technologies ont permis de faciliter la gestion des transactions. L’échange de valeurs est directement réalisable en ligne par le biais d’une marketplace ou encore d’une application de pair à pair, dont le rôle est de servir ici de médiateur entre demandeurs et fournisseurs de services. Ces plateformes jouent un rôle de facilitateur, plus que d’intermédiaire, en offrant avant tout un espace de mise en relation.
L’économie collaborative fait-elle réellement écho auprès des Français ?
Bien que le principe d’économie collaborative ait pu gagner en visibilité grâce aux avancées en matière de numérique, est-il pour autant un concept familier des consommateurs français ? C’est ce que nous avons souhaité évaluer en présentant à nos participants la définition suivante : “L’économie collaborative désigne un modèle économique où les individus achètent ou vendent un accès généralement temporaire à des biens ou des services fournis par une plateforme en ligne”.
58 % des répondants ne connaissent pas ou peu le principe de l’économie collaborative. Néanmoins, 41 % des personnes interrogées disent connaître ce concept (15 %) ou en connaissaient le principe sans toutefois pouvoir lui donner un nom (26 %).

Si le public français semble en théorie peu au fait de ce modèle économique, cette donnée ne signifie pas pour autant de leur part une absence d’intérêt ou d’usage de ces pratiques.
Ils sont ainsi 15 % à participer activement à des activités d’économie collaborative, et 31 % à y avoir eu recours dans le passé.

Parmi ceux qui n’ont jamais fait appel à ce type de services, 18 % se déclarent non intéressés, et 35 % sont en revanche ouverts à l’usage potentiel de ces derniers.
Si la notion d’économie collaborative ne semble pas connue par la majorité, elle recouvre cependant de nombreux domaines susceptibles d’intéresser davantage de Français et propres à transformer leurs habitudes de consommation.
Le facteur économique, motivation principale des adeptes de l’économie collaborative
Pour les consommateurs, l’un des avantages de l’économie collaborative est de pouvoir rendre le coût de la vie quotidienne plus abordable. Partager par exemple un véhicule personnel peut permettre au prestataire du service de diviser ses frais de carburant, tandis qu’un utilisateur dispose d’une option de mobilité supplémentaire sans devoir faire l’acquisition d’un moyen de transport.
Ce motif économique est bel et bien reflété dans les réponses apportées par le groupe de participants pratiquant des activités d’économie collaborative, puisque 76 % avancent comme avantage principal celui de pouvoir réaliser des économies.
Parmi les autres avantages perçus par le même groupe de participants figure celui de la commodité (37 %). Les plateformes dédiées aux activités d’économie collaborative permettent de faciliter l’accès aux ressources disponibles, qu’il s’agisse de trouver un transport, un hébergement, voire un prestataire de services professionnels à domicile dans sa zone géographique.

Préoccupation grandissante auprès des Français, le facteur écologique tend à les amener à des choix de consommation plus responsables. Favoriser le partage de ressources existantes participe à des efforts de durabilité, un motif qui semble également faire écho auprès des utilisateurs de service d’économie collaborative (27 %).
En réduisant le nombre d’intermédiaires, l’économie collaborative tend également à faciliter une relation de proximité entre prestataires de services et utilisateurs. L’absence d’intermédiaires est ainsi mentionnée comme l’un des avantages de ce modèle économique par 26 % des consommateurs sollicités.
L’hébergement, l’activité reine de l’économie collaborative
Bien que certains secteurs de l’économie collaborative se soient à leurs débuts concentrés sur les zones urbaines, leur développement s’étend au-delà.
Le principe d’ hébergement partagé en est l’un des exemples, en permettant aux utilisateurs de louer pour une période temporaire des biens immobiliers, et plus seulement en ville. Alternative économique à l’hôtellerie traditionnelle, cette activité est celle qui est la plus prisée par les répondants se disant utilisateurs de services d’économie collaborative (81 % d’entre eux), en particulier dans leurs habitudes en matière de tourisme.
Le secteur de la mobilité connaît également une certaine popularité auprès des utilisateurs de services collaboratifs (70 %). La visibilité dans ce domaine a notamment pu s’accroître en raison du soutien des gouvernements, dont l’un des objectifs est d’encourager des déplacements respectant le principe de sobriété énergétique, mais aussi de répondre aux problématiques actuelles d’écologie. L’on peut en observer différents exemples, comme celui du covoiturage ou des vélos en libre-service, dont l’implémentation s’est avant tout effectuée dans les grandes métropoles comme l’une des solutions visant à réduire les engorgements liés au trafic et à la pollution atmosphérique.
À la croisée des pratiques d’économie circulaire et d’économie collaborative, la mode est un autre secteur qui attire les utilisateurs de services collaboratifs (53 %). Sa croissance peut s’appuyer sur celle de plateformes digitales permettant de troquer, d’échanger ou de vendre des vêtements à prix réduit.
Enfin, la livraison de repas à domicile est un service utilisé par 41 % de ce groupe de consommateurs. Accélérée par la pandémie, cette habitude de consommation est également sous-tendue par une volonté des acteurs de la restauration de diversifier leurs activités, dans un contexte où la crise sanitaire a pu provoquer de nombreuses difficultés pour le secteur.

Certaines activités apparaissent toutefois comme moins ancrées dans les habitudes des consommateurs, à l’image des visites touristiques proposées par des locaux (14 %), dont l’autorité et la visibilité pourrait être moindre que celle des acteurs culturels traditionnels, ou encore les services aux entreprises tels que les espaces de cotravail (10 %), concurrencés par le développement du travail à domicile.
Des utilisateurs à l’épreuve de la désintermédiation
Les entreprises traditionnelles comme les hôtels ou les sociétés de location de voitures bénéficient d’un contexte intrinsèque de fiabilité et d’autorité, mais aussi d’un encadrement défini de leurs pratiques commerciales.
De par son principe, l’économie collaborative implique un transfert de ces facteurs sur le fournisseur de service en tant qu’interlocuteur privilégié, ce dernier pouvant être un particulier sans expérience particulière dans le domaine, et les plateformes de services de simples médiateurs dans la transaction.
Il peut alors sembler plus complexe pour le consommateur de savoir auprès de qui obtenir gain de cause en cas de litige, d’identifier ses droits, tout en s’exposant à une évaluation subjective de sa réputation personnelle par le biais d’avis donnés par des pairs.
Ces défis sont ceux qui sont bel et bien mis en exergue dans les réponses des utilisateurs de service collaboratifs.
À la question “Quels inconvénients présentent les pratiques d’économie collaborative par rapport aux méthodes traditionnelles de consommation correspondantes ?”, ces derniers mettent en avant :
- les difficultés liées à la traçabilité des paiements et des remboursements en cas de litige (51 %)
- les difficultés à obtenir de l’aide en cas de problème (42 %)
- les zones grises concernant la régulation dans certains secteurs (39 %)
- le risque d’obtenir des avis négatifs publics (35 %)
- le manque de clarté quant à la gestion des données collectées (30 %)
Certaines situations concernant les transactions peuvent s’avérer complexes pour les vendeurs et les clients. Il peut arriver que certains paiements soient effectués, en accord entre les deux parties, en dehors de la plateforme collaborative. Dans un scénario impliquant des litiges, il peut de ce fait être difficile aussi bien pour un fournisseur de service qu’un client de prouver sa bonne foi.
Définir les responsabilités de chaque partie impliquée dans une transaction est un élément aussi important dans un système d’économie traditionnelle que dans le cadre d’une plateforme collaborative. Cet élément permet aux clients d’obtenir les informations nécessaires concernant la nature du service qu’ils s’attendent à recevoir, ainsi que les bonnes pratiques à observer pour effectuer leur paiement.
Disposer de conditions générales claires et accessible s aux clients est en ce sens primordial.
Un manque de connaissances freine l’adoption de l’économie collaborative
Comme nous avons pu l’évoquer précédemment, une partie importante de notre panel se révèle peu impliquée dans les activités d’économie collaborative.
Afin d’identifier les raisons qui les retiennent dans la réalisation de ces pratiques, nous avons souhaité approfondir le sujet auprès de deux groupes de participants distincts :
- ceux qui déclarent n’être pas au fait de l’économie collaborative mais sont néanmoins intéressés,
- ceux qui ont affirmé n’être ni au courant ni intéressés par ce principe.
À la question “Pourquoi n’avez-vous pas encore participé à des pratiques d’économie collaborative ?”, le premier groupe de répondants indique comme raisons majeures :
- le manque de familiarité avec les outils technologiques permettant de réaliser ces activités (48 %)
- le manque de confiance dans ce type de services (23 %)
- l’absence de besoin spécifique (21 %)
Si le manque de confiance est une préoccupation commune à ces deux groupes de participants (23 %), l’inconfort de devoir partager des biens et des services avec des inconnus (31 %), et/ou un manque d’intérêt pour ces pratiques (28 %) sont les raisons premières avancées par le second groupe de répondants.
Bien que la question de la fiabilité de ces services constitue bel et bien l’un des bloqueurs évoqués, des problématiques telles que le manque d’expertise numérique des consommateurs sont à considérer.
L’une des clés pour offrir une expérience client en ligne optimale est de lui proposer un parcours d’achat simplifié, ainsi que des fonctionnalités qui peuvent aisément être prises en main.
Des logiciels de parcours client peuvent vous permettre d’identifier les difficultés potentielles rencontrées par vos utilisateurs et d’y apporter des améliorations.
Le défi majeur de la régulation gouvernementale
Le développement des plateformes d’économie du partage et leur rôle grandissant dans l’économie mondiale mettent les gouvernements devant la nécessité d’établir un cadre juridique spécifique.
Qu’il s’agisse de la protection des travailleurs, des droits des consommateurs, ou de réguler la problématique de la fiscalité entourant ce type d’activité, différents sujets requièrent l’implication des autorités gouvernementales.
Bien que l’Union européenne, ainsi que le gouvernement français, aient pu définir différentes directives propres à la réglementation de ce secteur, 79 % des utilisateurs de services collaboratifs estiment qu’un effort plus important devrait être fourni. Ainsi, lorsqu’il leur a été demandé de donner leur avis sur l’affirmation suivante “L e gouvernement devrait davantage réguler les pratiques d’économie collaborative”, 56 % se déclarent “d’accord”, et 23 % “totalement d’accord”. À l’inverse, 16 % de ce même groupe de participants marquent leur désaccord, voire un fort désaccord pour 5 %.

Notre étude a é galement demandé aux répondants utilisant ces services quel encadrement devrait être appliqué aux différents domaines de l’économie collaborative. Ces derniers ont estimé qu’un degré moyen à fort de réglementation devait avoir lieu en priorité pour :
- les services de transport (89 %)
- les services d’hébergement (87 %)
- les services professionnels (86 %)
- les services de loisirs et de divertissement (85 %)

L’économie collaborative façonne le paysage économique de demain
Que ce soit du côté des acheteurs et des vendeurs, mais aussi des entreprises traditionnelles, le modèle de l’économie collaborative contribue à transformer le paysage de l’offre commerciale.
L’un des principaux avantages de ce modèle économique est l’abaissement de la barrière d’entrée. Ce dernier peut offrir une plus grande liberté et flexibilité aux individus (ou aux groupes d’individus) pour obtenir mais aussi proposer des services, sous réserve que des solutions technologiques soient mises en place et que l’offre et la demande de ressources soient disponibles.
Un autre avantage de ce type d’économie est qu’il peut offrir des solutions en matière de durabilité. La perspective de réutiliser des ressources ou des stocks de produits existants non exploités, tout en générant des revenus par ce biais, s’avère encourageante pour les parties concernées. Ceci est également une piste de solution pour répondre à des problématiques environnementales auxquelles sont soumises aussi bien les gouvernements que les entreprises et les consommateurs.
Toutefois, si ce principe de consommation collaborative présente de nombreuses opportunités, il fait également l’objet de quelques critiques : préoccupations liées à l’incertitude de la réglementation, craintes liées aux droits des consommateurs mais aussi au respect des travailleurs font encore partie des zones d’ombre de ces activités.
Avec la progression du digital et des modèles de consommation des Français, l’économie collaborative continue cependant d’évoluer et semble promise à une forte croissance dans le futur, puisqu’elle pourrait atteindre selon les chiffres du ministère de l’Économie une valeur de 335 milliards de dollars d’ici 2025.
Méthodologie
Pour collecter les données de ce rapport, Capterra a mené une enquête en ligne en octobre 2022 auprès d’un panel de 1003 consommateurs français. Ceux-ci ont été sélectionnés selon les critères suivants :
- Réside en France
- Âgé(e) de plus de 18 ans
- A su définir correctement le principe d’économie collaborative